Gaieté hermaphrodite, Félicien Rops (1890).
Une
décision du tribunal de grande instance de Tours, prise au cœur de l’été
dernier (20 août 2015), et non commentée jusqu’ici, vient d’être révélée par
les médias qui la présentent comme une « bombe lancée à la face de notre
code civil » (dixit Libé).
Il
s’agit de mettre enfin dans une case juridique (le Droit ayant horreur du
vide), les hermaphrodites, intersexués et autres trans-genres. Ces êtres qui
naissent avec des attributs à la fois masculins et féminins, mais dans des
proportions inhabituelles pour qu’on puisse d’emblée (en l’espèce : à la
naissance), les classer dans un genre. Or, il est indispensable, dans une
société régie par les diktats des monothéismes et du libéralisme, d’attribuer
un sexe à un nouveau-né, pour le conditionner dès son plus jeune âge à son
futur rôle d’adulte, dévolu par son genre. On n’élève pas de la même manière un
petit garçon et une petite fille, leurs jeux, leurs centres d’intérêts, leurs
droits et devoirs, leurs fréquentations et leurs tenues vestimentaires devant
différer, de façon à les préparer à leur mission prochaine de reproducteurs
(trices) et consommateurs (trices), dans l’intérêt du marché.
C’est ainsi que les
médecins, affolés, somment les parents d’attribuer un « sexe d’élevage »
à leur enfant intersexué. Et pour les aider à ce que ce choix prenne forme – au
sens sale du terme (il s’agit quand même de fabriquer des quéquettes et des
zézettes) – ils jouent les docteurs Mengele et font subir aux enfants toutes
sortes de mutilations, les jetant dans un monde de souffrance pour parvenir, à
l’adolescence, à une destruction totale de leurs organes génitaux de naissance,
au profit de pseudo-pénis ou pseudo-vagins souvent restés, ou devenus,
improductifs, mais surtout, désormais, inaptes à les faire jouir.
La
terminologie étant capitale selon ce qu’on veut dissimuler ou faire apparaître,
la novlangue a substitué le mot d’intersexué à celui d’hermaphrodite, privant le premier des avantages du second.
L’antique hermaphrodite, l’androgyne, fils d’Hermès et d’Aphrodite, supposait
un être à deux sexes, doté à la fois de formes masculines et féminines. La
mythologie n’ayant que faire des modes de reproduction de ces êtres
légendaires, les filiations se succédèrent sans souci de crédibilité.
Aujourd’hui que la Grèce est sous tutelle et que la Présidente du FMI lui
impose de se comporter en « adulte », il était temps qu’elle
apprenne, enfin, comment on fait les bébés, et qu’elle admette que ces êtres,
aussi beaux soient-ils, sont de piètres reproducteurs. Et voilà comment les
hermaphrodites passent du tout / tout (tout à la fois homme et femme), au ni /
ni (ni homme ni femme).
Tant que la première
mission de l’être humain, lors de son séjour sur Terre, sera de s’y reproduire
pour perpétuer l’espèce, tant que la femme nullipare sera considérée comme
inaccomplie dans sa féminité, la sexualité sera réduite à sa simple fonction
reproductrice. Or, plaisir et procréation, s’ils ne sont pas antinomiques, sont
à tout le moins dissociables.
Si on leur foutait la paix
et les laissait grandir sans mutilations ni injections d’hormones, les
hermaphrodites pourraient être de merveilleux amants et amantes, forts de cette
dualité leur offrant une approche, in situ, des désirs à la fois masculins et féminins. Ils auraient toute
l’enfance et l’adolescence pour découvrir leur corps, le toucher, le caresser,
l’apprivoiser, sentir là où ça leur fait du bien, cultiver une apparence plus
proche des critères masculins ou féminins, si tel devenait leur choix, ou ériger
en canon de beauté leur ambivalence sexuelle… Bref, faire ce que font tous les
enfants avec ce que la nature leur a donné, car il n’est pas plus simple – pour
qui n’est pas doté que du seul cerveau reptilien – d’être né garçon, fille ou
hermaphrodite.
Alors,
NON ! L’avènement juridique du genre NEUTRE n’est pas une avancée !
Le
neutre est, en linguistique, le genre donné à une catégorie grammaticale dans
laquelle se rangent les noms d’objets ou d’êtres étrangers à l’attribution d’un
sexe et, formellement, les noms qui ne présentent pas les caractéristiques du
masculin et du féminin (Petit Robert). Le genre neutre, c’est donc l’ancrage de l’hermaphrodisme dans le
règne du ni / ni. Le neutre est défini comme celui qui se tient à l’écart des
conflits, qui ne prend pas parti, qui n’est ni positif, ni négatif. La teinte
neutre est indécise, sans éclat. Le neutre est dépourvu de passion,
d’originalité, il reste froid, détaché, inexpressif (toujours Robert). En langage militaire et policier, neutraliser un
individu, c’est s’en saisir, l’entraver, l’immobiliser.
Alors
qui, raisonnablement, peut s’enorgueillir d’être neutre ? Pour Victor Hugo
« en temps de révolution, le neutre est impuissant », et quand bien
même celle-ci ne serait pas pour ce soir, il n’est pas question de priver les
hermaphrodites de cette explosion de joie future. C’est pourquoi, face au
neutre, Lilith propose une alternative : ajouter aux genres masculin et
féminin, ceux de mascufem et fémiculin, selon que les
hermaphrodites préfèreraient mettre en avant un sexe plutôt que l’autre. Quatre
genres au lieu de deux, voilà comment enrichir l’humanité sans se plier à
l’injonction de se reproduire...