vendredi 23 août 2013

À l'impossible - seul - je suis tenue



Je rêve d’un réveil amniotique depuis lequel je glisserais chaudement de ma nuit vers un jour accueillant. Rien ne viendrait troubler la mémoire de ce dernier songe, entre mes jambes encore si vivant.
Mes yeux embrumés soulèveraient lentement leurs persiennes sur un champ de beauté cultivé par l’amour insensé de la perfection.
La douce musique d’un quatuor de cigales, mené par une brise attentive aux prémices de mon agacement, agiterait sa baguette vers le bas, prenant sur elle le soin de faire cesser le moindre de mes froncements.
Tous les matins, immobiles et patients, m’attendraient un bateau ou un train, si l’envie me prît d’aller danser très loin, sur la ligne d’horizon… C’est simple pourtant !
Alors pourquoi faut-il qu’au lieu de tout cela, chaque fois que je suis sur le point de goûter au lever de ma plénitude, s’invitent, dans mon aube si fragile, le bruit strident d’une scie circulaire, ou pire encore, les cris et les pleurs, suivis du rire suraigu, d’un enfant ?

13 commentaires:

  1. Le son émis par l'enfant est, avec celui du militant de base, la chose la plus désespérante sur cette planète.

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  2. Parce que la vie n'est pas un choix.

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  3. au Marquis :

    Certes, Très Cher Marquis. Mais comme si nous étions condamnés à subir les pénibles conséquences des erreurs que nous avons pris soin de ne pas commettre, ces sons désespérants reviennent en écho percer inlassablement nos tympans. Il en va de même des puants hydrocarbures gluants affectant le nez délicat des geishas qui persistent à vouloir poser leurs petons sur les plages souillées du pays du soleil levant.
    Que faire ? Mourir ! me direz-vous.
    C’est trop facile : c’est ce qui nous attend.

    à Cédric :

    Non, en effet, ce n’est pas un choix.
    C’est un crime.

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    1. C'est un crime, mais jamais je ne me poserai en victime.

      Aller au-delà d' "être en vie", aller au-delà de la vie, aller dans la mort, tout au fond de la mort, et creuser encore, jusqu'à naître enfin par soi-même en passant par le trou creusé de ses propres mains dans la mort.

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  4. Dame Lilith, dormir n'est pas mourir. Promener des chèvres à l'écart d'un monde moribond me semble également salutaire.
    Puis-je vous offrir une tasse de thé ?

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  5. Une tasse de thé ? Quelle drôle d'idée... Ne serait-ce pas ce satané Hamlet qui vous l'aurait soufflée ?
    Et pourquoi pas, plutôt, quelque breuvage malté, brassé dans vos eaux de la Meuse ?

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  6. J'ai tant bu autrefois que je suis saoul à jamais. La moindre goutte d'alcool me tuerait dans l'instant, me privant des nouveaux vertiges de la sieste. Mais je vous ferai porter par mon rhinocéros un plateau garni de pur malt, d'eau et de glaçons de Meuse. Charger à contresens sur les voies rapides est pour lui la meilleure façon de conserver sa bonne humeur.
    C'est un être d'une extrême délicatesse, vous verrez: lorsque vous entendrez le doux frottement de sa corne sur votre porte, il aura déjà disparu, vous laissant déguster cet auguste breuvage au sein du silence des espaces infinis.

    Dame Lilith, toutes cornes dressées les chèvres de l'Orée vous saluent.

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  7. Très Cher Marquis,

    Loin de moi le désir de vous faire passer de vie à trépas. Après tout, un thé, s’il est au jasmin et servi dans une tasse en porcelaine fleurie, posée sur un plateau d’argent finement ciselé et porté par une main calleuse aux doigts solides, sous les ongles desquels la terre de votre jardin se dissimule, pourquoi pas ?
    Mais faites savoir à votre rhinocéros que ma porte sera ouverte et qu’avant qu’il ne disparaisse, j’entends bien lui planter dans la corne une lettre de remerciement.

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  8. Pour Cédric,

    La particularité du crime de vie, en opposition au crime de sang, est de ne pas faire de victime mais bien pire que cela : des vivants.
    Sinon, à part ça, cher Cédric, n'auriez-vous pas fait, par hasard, l'expérience du coma ?

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    1. Non, chère Lilith, pas que je sache... mais les pires comas ne sont-ils pas justement ceux dont on ne sait rien ?

      Par contre, il semblerait que je sois mort, que quelque chose en moi soit mort, peut-être même bien, tout simplement, que "moi" est mort...

      A part ça, à l'instar de notre cher Marquis, je ne bois pas d'alcool (ou si rarement et si peu), ça sera donc un thé pour moi.

      Mais je le boirai évidemment à l'extérieur, et puis je me le préparerai moi-même, je ne suis pas du genre à m'inviter.

      Vous êtes une reine.

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  9. Cher Cédric,
    Si "je est un autre " et que votre "moi" est mort, quelle chance ! Un champ d'incarnations s'offre à vous...

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  10. La réincarnation de son vivant ? Intéressant...

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  11. Mieux que cela : le vivant réincarné !

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