vendredi 27 septembre 2013

Bazaar België

 
 

Deux douzaines englouties et pas la moindre perle cachée sous les cils noirs de ces hermaphrodites iodés, lovés au fond de leur écrin irisé. Pourtant – encouragée par la passionnée poissonnière – Lilith n'avait pas hésité à s'adjoindre l'aide précieuse d'un champagne millésimé, connu pour ses pouvoirs magiques. 
Tant pis, ce sera l'occasion de revenir – une fois de plus – en pélerinage à la "Mer du Nord", avant de faire un pied de nez à Sainte-Catherine et d'amorcer la rude escalade des artères de la capitale du plat pays.
Ce samedi-là, Lilith n'alla pas bien loin. Elle n'avait pas encore quitté la place que son regard fut attiré par la prometteuse annonce des "100 meilleures œuvres d'art belge" selon Claude Blondeel. Abandonnant l'idée de se rendre au Musée du Slip, derrière la grand-place, elle s'engouffra dans la Centrale for contemporary art sans la moindre idée de ce qui l'attendait. 
En fait, le bazar de cet éclectique chroniqueur, écrivain et critique d'art, tient d'un cabinet de curiosités que l'on pourrait trouver chez un collectionneur anarchisant si ces vitrines n'étaient pas passées de mode : Lilith y rencontra le sombre Léon Spilliaert, l'allumé Benoît Poelvoorde, le taquin Noël Godin, entartant à l'infini un Bernard-Henri Lévy offusqué dans sa bien-pensance, le vénéré Frans Masereel, l'insignifiant Francis Alys, le malheureusement inévitable Constant Permeke, l'improbable Georges Simenon et bien d'autres…
Mais c'est au cœur de ce melting-pot artistique que Lilith découvrit les quelques perles qui n'auraient su manquer à sa balade bruxelloise : une caisse à outils géante et bariolée, débordant de kalachnikovs et autres lance-roquettes (Terrains de chasse éternels, 1990) d'un certain Patrick Van Caeckenbergh, un court-métrage de Marcel Mariën intitulé L'imitation du cinéma, daté de 1960, désopilante farce érotico-freudienne et anticléricale (pour les curieux : lire le Riche Belgique 5, Bruxelles et Gomorrhe, de l'incontournable Moine Bleu) et une appétissante "ambitieuse" de Leo Dohmen (1958), dont le pubis en fourrure léopard donne envie d'adopter une féline.
Enfin, Claude Blondeel ouvre son exposition par un hommage au satanique Félicien Rops : Novissima verba 2000, de Jacques Charlier, une inspiration photographique de la sulfureuse Pornocratès
Si sa mise en scène reste fidèle au Maître, en revanche, la disparition de l'éminence porcine est à Pornocratès ce que les 50 nuances de grey sont au divin marquis, dommage…



Néanmoins, cet hommage aura eu le mérite de faire découvrir à Lilith ces quelques lignes écrites par Rops et qui le hissent désormais au sommet de son cœur, où il tenait pourtant déjà une très bonne place :

Mon âme est enfermée dans mon corps comme un tigre affamé dans une cage en acier, et mes terribles passions rugissent comme lui. Tout le monde me paraît si petit et si pitoyable, sans aucune classe : des voyageurs de commerce, dans leur misérable érotisme.

Exposition jusqu'au 6 octobre 2013.

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